Sanitaire
Mortellaro : une maladie dévastatrice pour les bovins

Face à la Mortellaro, ou dermatite digitée, aucune technique seule, à l’heure actuelle, ne donne entière satisfaction pour l’éradiquer dans un troupeau. Néanmoins, il existe des moyens de limiter la prévalence et ses impacts. Le point avec le GDS de la Loire.

Mortellaro : une maladie dévastatrice pour les bovins
Le parage permet de mettre à l’air libre les lésions de Mortellaro, pour limiter le développement des bactéries responsables, qui sont favorisées par les milieux sans oxygène (anaérobie). ©M. Delacroix, boiteries-des-bovins.fr

La Mortellaro, également connue sous le nom de dermatite digitée ou pododermatite, est une maladie infectieuse touchant principalement les bovins. Sa prise en charge nécessite une grande rigueur dans la détection, le traitement, le contrôle des achats, l’hygiène et le confort des bâtiments. Depuis plusieurs années, la Mortellaro est certainement la maladie des pieds des bovins qui pose le plus de problèmes dans les élevages laitiers. Aujourd’hui, cela devient également une vraie problématique dans les élevages allaitants. Les connaissances sur cette maladie progressent lentement malgré les désagréments qu’elle suscite dans les élevages, en termes d’inconfort pour les animaux et de pertes économiques liées.

Qu'est-ce que la Mortellaro ?

La Mortellaro est une maladie infectieuse polybactérienne et multifactorielle. Cela signifie que plusieurs espèces de bactéries ont été mises en évidence dans les lésions et que plusieurs facteurs environnementaux rentrent en compte dans le déclenchement de la maladie. Il existe une grande variété de tréponèmes (= bactéries anaérobies pathogènes) associés à la dermatite digitale. Ces bactéries pénètrent dans les tissus mous du pied, provoquant une inflammation et des lésions douloureuses, entrainant des problèmes de mobilité et une détérioration de la santé générale des animaux. Très contagieuse, elle se propage d’autant plus rapidement que toutes les conditions sont favorables à son développement. Il est essentiel de comprendre cette maladie, ses causes, ses symptômes et les mesures préventives à prendre pour maintenir la santé du troupeau.

Symptômes et diagnostic

La Mortellaro se caractérise par l’apparition, souvent brutale, d’une boiterie, d’une enflure sur la région coronaire (dessus du pied) et d’une rougeur des tissus autour du sabot. Des lésions ulcéreuses et des nécroses peuvent également se former, entraînant une douleur intense pour l'animal. Les lésions liées à la dermatite digitée atteignent le plus souvent les postérieurs des animaux. Les bovins touchés ont une réticence à se déplacer, une perte d'appétit et une baisse de production.

Le diagnostic de la maladie passe généralement par une observation des pieds du bovin. Celle-ci est souvent réalisée par un vétérinaire ou un pareur, qui effectuera un examen approfondi des pieds. Les lésions de la maladie sont suffisamment caractéristiques pour ne pas être confondues avec d’autres pathologies de pieds. Seul l’examen du pied peut permettre d’établir un diagnostic. Les bactéries sont présentes dans l’environnement de façon normale, il serait alors difficile de conclure que leur présence sur un prélèvement signifie qu’elles en sont la cause.

Traitement

Il est important de traiter toute boiterie comme une urgence. Le taux de guérison augmente considérablement dans les 24 à 48 heures. La propagation et le coût en sont également réduits. Bien que le traitement contre la Mortellaro semble compliqué et que la maladie n’est jamais soignée en totalité, plusieurs approches peuvent être réalisées.

Tout d’abord le traitement individuel. Il est toujours indiqué d’effectuer un parage fonctionnel par un professionnel. En cas de lésions, le parage aura pour effet de nettoyer et d’aérer les onglons afin de dégrader le milieu de prédilection des tréponèmes. Le vétérinaire ou le pareur pourront également, lors de lésions plus importantes, procéder à des soins plus poussés (chirurgie, pansements, etc..). Le traitement par antibiothérapie pourra être proposé par le vétérinaire, si la contention des animaux se révèle délicate. L’application de spray antibiotique de façon localisée peut se faire à condition de respecter le nombre d’application et les conseils d’hygiène strictes.

Le traitement collectif présente, quant à lui, plusieurs intérêts : il réduit la pression bactérienne sur l’ensemble des animaux traités. Les atteintes précoces ou les lésions chroniques sont systématiquement gérées. Une fois encore, le parage fait partie de ce traitement collectif. En complément, plusieurs techniques sont possibles : pédiluve (classique ou sec), pulvérisation, système mousse, tapis, traitement de la litière avec des bactéries concurrentielles, etc… Toutes ces mesures sont à adapter aux produits utilisés, au bâtiment et à l’éleveur. Pour autant, la mise en place peut présenter des contraintes : réticences au passage dans les pédiluves, temps d’exposition, nombre de passages, utilisation de produits présentant un risque pour l’Homme ou l’environnement...

Facteurs de risques et biosécurité

Il a été identifié, depuis plusieurs années maintenant, que la Dermatite digitée est une maladie multifactorielle. Certains facteurs peuvent favoriser l'apparition de la Mortellaro dans un troupeau bovin.

L’hygiène et l’humidité sont des facteurs fondamentaux : les contacts prolongés de la peau avec les excréments et l’urine, l’humidité excessive et l’ammoniac favorisent l’érosion de la peau nécessaire à la pénétration des tréponèmes. Un bâtiment avec une bonne ambiance et une ventilation suffisante permet de limiter ce risque. Il est également important de maintenir un environnement propre et sec, que ce soit sur les aires de couchage et les zones de circulation. La température de la litière (maximum 40°C), la fréquence de curage et de paillage sont des pratiques pouvant aider à réduire l’humidité. Le contrôle de la surdensité des cases pour réduire la pression bactérienne et la propagation est un autre moyen de maîtrise de cette pathologie. La possibilité, pour toutes les vaches, de se coucher suffisamment longtemps joue considérablement sur la bonne santé des pieds de façon générale.

Tout ce qui peut entrainer des microlésions de la peau doit être repéré : sols irréguliers ou abrasifs, trop glissants, chemins caillouteux. Le transfert des refus de la table d’alimentation sur l’aire bétonné devant les cornadis est à éviter. Ces derniers peuvent également être source de microlésions sur les pieds.

Une alimentation équilibrée, riche en minéraux et vitamines essentiels contribuera à renforcer la santé globale des animaux, donc leur immunité. Le pâturage concourt généralement à diminuer la dermatite digitée. Les soins inappropriés (boiteries non détectées, non soignées ou mal soignées, parage de mauvaise qualité) sont des facteurs aggravants.

De la même façon, si le parage est un outil intéressant dans le traitement de la Mortellaro, il faut être vigilant à ce qu’il soit fait dans de bonnes conditions. La désinfection des instruments de parage (entre chaque exploitation et après un animal atteint traité), du matériel en commun, de l’infirmerie, la mise en place de pédiluve pour les intervenants extérieurs sont des bons moyens d’éviter la propagation de la maladie dans son élevage.

L’achat d’animaux non contrôlés est un facteur essentiel d’introduction de la Mortellaro. Il faudrait lever et examiner les pieds des animaux achetés avant de les introduire dans un troupeau sain. Le respect d’une quarantaine stricte, peut permettre de détecter rapidement une boiterie inhabituelle. La réforme précoce des animaux atteints limitera la propagation, le cas échéant.

GDS de la Loire