Prévention
Bâtiment de stockage : attention à l’étincelle

Les risques d’incendie sont réels dans une exploitation d’élevage, et plus particulièrement dans le bâtiment de stockage. Voici quelques conseils, souvent de simple bon sens, pour prévenir l’accident irréparable.

Bâtiment de stockage : attention à l’étincelle
Pour limiter le risque d’incendie, le premier réflexe est de séparer les risques, autrement dit, de faire un bâtiment de stockage à l’écart des autres bâtiments de l’exploitation.

Les incendies ne sont pas si fréquents sur une exploitation, mais ils sont toujours un véritable traumatisme pour un éleveur, en plus d’une avarie financière. Pour se protéger des flammes, il faut comprendre leur fonctionnement. Le feu, ce sont trois éléments, le fameux triangle : le comburant (l’oxygène), le carburant (combustible) et l’énergie d’activation (l’étincelle). L’objectif est donc d’en supprimer un, le plus facile étant le dernier. Le fourrage est hautement inflammable, c’est un formidable “carburant“. Il n’y a pas besoin d’une grande énergie pour y mettre le feu, une simple étincelle suffit.  

Diviser pour moins brûler

Le premier réflexe est de séparer les risques, autrement dit, de faire un bâtiment de stockage à l’écart des autres bâtiments de l’exploitation, à condition bien sûr que cela soit techniquement et financièrement possible.  « Si toutes les activités sont réunies sous un même bâtiment, dans notre analyse de risque, nous prenons en compte l’ensemble du risque incendie, y compris le matériel et le cheptel », résume Gilles Bonnet, ingénieur prévention pour Groupama.

Seconde précaution de base, si l’agriculteur doit remiser du matériel dans son bâtiment de stockage, il doit se limiter au matériel (charrue, benne, enrouleur, épandeur, etc.), mais pas d’engins motorisés. Le tracteur devra être stocké à l’écart, au moins à 3 ou 4 mètres du stockage. S’il doit entrer dans le bâtiment, il devra être muni d’un coupe-circuit au niveau de la batterie et d’un pare-étincelle au niveau du pot d’échappement. « Et ne le laissez pas tourner tout seul », précise le conseiller.

L’utilisation d’engins (mélangeuse, broyeuse…) doit aussi se faire à distance du bâtiment. Il est bien sûr strictement prohibé de fumer et d’effectuer tous les travaux générant des points chauds à proximité (meuler, souder, …). Pensez aussi à tenir le sol du bâtiment propre.  S’il est jonché de fourrages, le feu se propagera d’autant plus facilement.

Le cas échéant, l’agriculteur doit être vigilant sur l’installation électrique. « Il faut un tableau sur un support incombustible, dans un coffret adapté. Il doit être installé par un électricien professionnel. »

Pour les appareils d’éclairage, les spots halogènes sont à proscrire. Il faut privilégier les ampoules type LED (diode électroluminescente) qui chauffent moins et les positionner à l’écart du fourrage « car sinon, l’ampoule est masquée lors de la mise en place du stockage et c’est comme ça qu’on oublie de l’éteindre… ». Pour la foudre, la structure du bâti en IPN est généralement reliée à la terre ce qui limite les risques sauf pour les constructions anciennes.

Attention à la surfermentation du foin

Les risques d’incendie sont particulièrement élevés à la belle saison, au moment de la rentrée des fourrages. Un foin qui arrive humide se met à surfermenter et ce n’est pas bon pour la valeur nutritionnelle. Et au-delà, il fait planer un risque sérieux d’incendie.

Il faut d’abord mesurer l’hydrométrie. En dessous de 20 %, c’est tout bon. Entre 20 et 30 %, le laisser sécher dehors avant de le rentrer. Au-delà, il y a danger.

Vous devez aussi, et surtout, vérifier la température à l’aide d’une sonde. Si elle se situe entre 45°C et 65°C, il est en surfermentation. Il faut alors réaliser des relevés quotidiens pour le surveiller.  Au-delà de 65°C, il y a danger, et à partir de 70°C, ne vous posez plus de question, appelez les pompiers. N’essayez pas d’enlever des bottes tout seul. Gilles Bonnet signale que toutes les caisses locales de Groupama sont dotées de sondes (hydrométrie et température) qui sont mises à disposition des adhérents. Vous pouvez bien sûr vous acheter votre propre sonde. Il existe des modèles qui se fixent sur les fourches des tracteurs, mais aussi des sondes connectées qui vous permettent de suivre en temps réel l’évolution des températures avec même des alertes SMS sur votre smartphone. Évidemment, le coût de ces dernières est plus élevé.

Même si c’est généralement ponctuel, Gilles Bonnet appelle aussi à la vigilance quant au stockage d’ammonitrate, « le plus éloigné des fourrages possible ».

Extincteur ou RIA

En complément des mesures de prévention, il faut envisager des moyens de protection contre les flammes, tout en sachant qu’au-delà d’une minute, il sera déjà trop tard pour intervenir. 

L’extincteur est l’équipement de base. Il faut en placer de préférence un par bâtiment. Il existe plusieurs modèles : « Privilégiez un extincteur de 9 litres à eau avec additif et antigel (jusqu’à - 10°C voire -30°C dans les gammes supérieures) ». Malheureusement, il est limité en volume, il ne dure environ qu’une minute. Vous pouvez opter pour l’installation d’un RIA (Robinet d’incendie armé) : un long tuyau à dérouler qui peut aussi servir à tout autre chose (laver le tracteur par exemple). « En cas d’incendie, il a plus de pression et débit permettant d’intervenir en attendant l’intervention des pompiers ».

Vérifiez aussi la position de la borne à incendie la plus proche ou l’existence d’un réservoir d’eau à distance raisonnable. Les pompiers demandent 120 m3, soit deux heures d’usage. Il n’est pas inutile de convier les soldats du feu sur les lieux au moment où vous construisez un bâtiment. Ils doivent bénéficier de facilité pour tourner autour du bâtiment lors d’une éventuelle intervention.

En tout état de cause, les éleveurs doivent mener une véritable réflexion sur ce sujet, qui ne se prend pas à la légère. Les assureurs envoient parfois des conseillers prévention, notamment en cas de construction d’un nouveau bâtiment. C’est le cas de Groupama. « On visite, on conseille, on attire l’attention des éleveurs sur les différents risques présents dans leurs bâtiments, car ils ont souvent la tête dans le guidon et ne voient plus les dangers au quotidien. », conclut-il.

 

DB