Gastronomie
« Il faut être fiers de notre terroir »

 A 33 ans, Antoine Bergeron est chef étoilé du restaurant gastronomique La Source à Saint-Galmier. Natif de la Loire – à Cuzieu, précisément, il a à cœur de développer la cuisine de terroir, en s'appuyant notamment sur des produits locaux aussi divers que variés. Passionné de vin et parrain de l’édition 2021 du salon La Loire aux 3 vignobles, il s'intéresse à trouver des combinaisons audacieuses, toujours dans cet esprit de revalorisation du terroir. Entretien.

« Il faut être fiers de notre terroir »
Antoine Bergeron, chef étoilé du restaurant gastronomique La Source, est fier de mettre en avant les produits du département à travers sa cuisine.

Au sein de son restaurant étoilé, la personnalité du chef Antoine Bergeron témoigne de son fort attachement à la valorisation constante des produits issus de l’économie locale. Un produit local trouvera alors un écho favorable auprès de sa clientèle. Car le chef étoilé, par la cuisine qu’il propose à ses clients, peut influencer dans l’achat de produits locaux auprès de producteurs de sa région, voire de son département. D’ailleurs, sur le site internet de son restaurant gastronomique, Antoine Bergeron met un point d’honneur à rappeler la provenance des différents produits qu’il utilise dans sa cuisine. Ceci en rappelant « Quand le produit est au cœur de notre cuisine... il participe à la signature des meilleurs plats ».

 

Mettre en avant les produits du terroir, ça a toujours été une évidence pour vous ?

Antoine Bergeron (A.B.) : « Lorsque nous avons reçu l'étoile Michelin, mon équipe et moi, nous nous sommes dit qu'il fallait que l’on aille encore plus loin, parce que nous sommes porteurs d’une image pour la région. Lorsqu’il y a eu le confinement, puis que l’on en est enfin sortis, nous nous sommes concertés. Il fallait que nous profitions de cette période où les gens étaient recentrés sur le local pour nous y consacrer pleinement, même si on était déjà bien intégrés – au moins à 50% de nos produits - pour essayer d'aller au plus près possible du 100%. A présent, nous sommes probablement entre 80 et 90% de produits ligériens. Donc la sortie du confinement a plutôt été vu, non comme un déclic, mais comme la fin du déclic, puisque l'on a toujours mis en avant le terroir ligérien, comme de proximité. »

Comment avez-vous réussi à travailler avec des producteurs locaux ? Aviez-vous déjà noué des relations ?

A.B. : « Étant originaire de la Loire, j’ai par la suite appris le métier au Bougainvillier à Saint-Galmier, puis au château Blanchard, à Chazelles-sur-Lyon, entre autres. Et au fil de mes expériences, je me suis lié d’amitié avec certains producteurs locaux. Du coup, on avait une belle base de fournisseurs locaux – les légumes venaient de Saint-Bonnet-les-Oules, le cochon à L'Hôpital-le-Grand, les escargots à Saint-Galmier - son produit-phare. Et par la suite, on s'est dit que l'on voulait aller chercher encore plus loin. Nous nous sommes rendus compte qu'il y avait encore plus de choses que ce que l'on croyait dans la Loire et que l’on souhaitait essayer d'y rester un maximum. »

Votre produit-phare étant les escargots, et au vu de votre attrait pour le vin, y a-t-il de belles combinaisons à faire ?

A.B. : « Il est vrai que l'escargot, c'est un produit que j'adore ; Gilles Deleage, le producteur, je le connais depuis que je suis tout gamin. C'était le beau-frère de M. Charbonnier, où j'ai fait mon apprentissage au Bougainvillier. Donc, il me connait depuis que j'ai attaqué la cuisine. Et puis, c'est aussi une belle opportunité, car c'est le producteur le plus près du restaurant, à environ 500 mètres. Il faut tout de même dire que l'accord escargot-vin n'est pas le plus facile. L'escargot est au final un produit qui est assez neutre à la base. C’est la manière dont on va le cuisiner, et avec quelle sauce, qui déterminera le vin que l'on mettra en face. La sauce va dicter en grande partie l'accord. Un escargot en plat, on va par exemple pouvoir aller sur un vin rouge léger. J'insiste vraiment sur le fait qu'il est « tout-terrain », en quelque sorte. »

Les vins du territoire, comment les caractériseriez-vous ?

A.B. : « Dans la Loire, on peut trouver tous les types de vins. On travaille beaucoup avec les vignerons ligériens et on met beaucoup en avant les côtes-du-forez. Je suis ami avec Jacky Logel, à Marcilly-le-Chatel. On a la côte-roannaise qui a un terroir à exprimer, tout comme les côtes-du-forez. Tout le monde s'y retrouve. On a aussi des vins des côtes-du-rhône dans notre département, il ne faut pas l'oublier. On a un très beau panel de vins. »

Sans parler d'escargots cette fois-ci, quelles associations aimez-vous mettre en avant avec du local ?

A.B. : « J'aime beaucoup la fraicheur des côtes-du-Forez, avec le cépage Gamay. Et en ce moment, on a mis quelque chose en place avec mon boulanger, c'est un pain feuilleté aux côtes-du-forez, que l'on sert avec du beurre. Le vin rouge apporte une petite touche d'acidité et le gras du beurre l’accompagne très bien. C'est une nouveauté que nous avons mis en place au mois de juin et je pense qu'on va la garder, parce que les gens apprécient. Après, on a aussi le Ribambulle de Jacky Logel ; c'est un vin pétillant légèrement sucré qui marche excessivement bien avec les fraises et les fruits rouges, de manière générale. »

Selon vous, la Loire est-elle sous-estimée, en termes de vins et de producteurs locaux ?

A.B. : « Oui, bien sûr. On est beaucoup moins mis en avant que certains départements ou régions. Et puis, pour parler du vin, on traîne un peu des casseroles. Dans le temps, les côtes-du-Forez, c'était le vin que l'on buvait tous les jours à huit degrés. Et il a fallu dépoussiérer cette image et c'est pour ça que les viticulteurs ont vraiment porté cette volonté. Il faut que l'on soit fiers de notre territoire. Pour contrecarrer cette « mauvaise image », je pense que la solution se fait tous les jours. Nous, quand on met en avant les vins, quand les vignerons font des salons comme la Loire aux 3 vignobles pour faire goûter leurs vins, les visiteurs se rendent vite compte que le travail est bien fait, avec un vrai savoir-faire, et que le territoire est porteur de plein de belles choses à découvrir. Le vignoble des côtes-du-Rhône est certes tellement plus grand et a des vins exceptionnels, bien sûr, mais comme il y en a beaucoup plus que dans la Loire, je trouve qu'on arrive à avoir plus de mauvaises surprises. »

Axel Poulain