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Coupe du monde : quatre raisons de la suivre / ne pas la suivre

La Coupe du monde 2022 démarre le 20 novembre au Qatar. Et malgré l’engouement qu’un évènement d’une telle envergure devrait susciter, nombreux sont les réticents, au vu du contexte particulièrement délicat. Voici donc un panel d’arguments pour vous aider à revoir ou conforter votre position.

 Coupe du monde : quatre raisons de la suivre / ne pas la suivre
Du 20 novembre au 18 décembre, la Coupe du monde, édition 2022, se déroulera au Qatar. Quatre ans après la dernière, les supporters donneront à nouveau de la voix pour encourager leur équipe et vibrer lors de matchs inoubliables… même si le pays hôte suscite de vives polémiques, entre droits humains et aberration écologique.

L’hiver, voilà une saison bien insolite pour supporter son équipe ou, a minima, suivre cette compétition internationale. Finis les traditionnels barbecues et soirées en terrasses, bonjour la raclette et les soirées plaid au coin du feu. Attribuée au Qatar en 2010 par la Fifa (Fédération internationale de football association), son organisation soulève de nombreuses problématiques. Un florilège de réflexions, pour et contre, ont été sélectionnées pour vous aider à vous positionner.

POUR : 

1.     Un évènement incontournable 

La Coupe du monde, c’est le rendez-vous sportif ultime des footeux. Souvent comparée à la ”Ligue des Champions” des nations, elle est l’évènement le plus attendu, dû en grande partie à sa rareté (tous les quatre ans). Par ailleurs, elle réunit les 32 meilleures sélections nationales du monde. Si cette compétition existe depuis 1930, où l’Uruguay est sorti vainqueur face à l’Argentine, elle n’a connu qu’une seule annulation (en 1942, pour cause de Seconde guerre mondiale). Depuis 1950, elle se tient sans discontinuer.

2.     Les joueurs n’y sont pour rien, les supporters non plus !

Sur le plan sportif, les joueurs, au même titre que leurs sélectionneurs, ne devraient pas pâtir de leur volonté de participer. Par ailleurs, si une nation qualifiée venait à renoncer à prendre part à cette compétition, elle se verrait sanctionnée sur plusieurs points : classement mondial, risque de disqualification pour les compétitions futures, etc. Bien des supporters souhaitent également donner de la voix à ce rendez-vous tant attendu. Et s’ils sont nombreux à ne pas cautionner les dérives extrasportives, boycotter cette Coupe du monde serait aussi une forme de punition injuste pour une décision prise par d’autres il y a de cela plus de dix ans. Ce qu’a résumé l’acteur Roschdy Zem il y a quelques semaines : « Pourquoi prendre le spectateur en otage en lui disant de ne pas regarder ? On savait à qui on la donnait […] Nous, ce qu’on aime, c’est le foot, on n’a pas choisi le Qatar. Ce n’est pas nous qui décidons. »

3.     Manquer la dernière de Messi, Ronaldo et consorts, jamais !

Ne pas suivre ce rendez-vous, c’est choisir délibérément de manquer l’ultime participation de “CR7” et de Lionel Messi. La fin d’une ère que tout amateur du sport au ballon rond ne voudrait rater pour rien au monde. Les deux rivaux ont chacun participé à quatre éditions sans jamais parvenir à aller au bout. Petit avantage pour le petit prodige argentin qui s’est hissé en 2014 jusqu’en finale (perdue contre l’Allemagne), alors que le génie portugais avait « seulement » atteint la demi-finale en 2006 (victoire des Bleus). Si cette édition 2022 signera la fin de ces deux monstres, elle marquera également la dernière de Robert Lewandowski, Luka Modric, Karim Benzema, Manuel Neuer, Luis Suarez, Thiago Silva, Edinson Cavani, Angel Di Maria, etc.

4.     Oublier le reste et garder les étoiles dans les yeux 

Pour rendre à César ce qui appartient à César, citons le journaliste de RTL William Galibert qui a récemment déclaré : « Je veux me dire que tous les quatre ans, pendant trois semaines, j’ai le droit d’avoir 10 ans à nouveau. » Qu’importe la saison ou le parcours de l’équipe de France à venir, la Coupe du monde est la compétition des souvenirs. Avec nostalgie, elle rappelle à chacun les grands moments, de joie comme de peine, et contribue à développer le palmarès d’un pays et de toute une nation. Elle fédère une grande part de la population et unit chacun, malgré les différences. La Coupe du monde rassemble et met de côté, le temps de quelques semaines, les soucis de la vie quotidienne. Et c’est aussi cela qui en fait son charme.

 

CONTRE : 

1.     Un drame humain

En 2010, lorsque le Qatar se voit attribuer l’organisation de la Coupe du monde 2022 par la Fifa, il est à ce moment-là bien loin de disposer des infrastructures nécessaires pour accueillir un tel évènement. Pour y remédier, l’émirat du Golfe a eu recours à l’embauche de travailleurs immigrés de pays limitrophes. Or, entre les « salaires » dérisoires et les conditions de survie – sous-alimentation, manque de soins, cadence de travail démesurée – le bilan est terrible. Une enquête menée par le célèbre journal britannique The Guardian fait état de près de 6 500 travailleurs étrangers décédés, un nombre sans précédent qui établit son organisation comme la plus meurtrière de l’histoire.

2.     Un désastre écologique

Pays habitué à dépasser les 40°C, le Qatar devrait avoisiner les 20°C en cette période de Coupe du monde. Une situation qui n’a pas empêché les qataris de climatiser ses huit stades, dont sept sont à ciel ouvert. Ajoutez à cela la consommation d’eau démentielle pour entretenir la verdure des pelouses. Dernier point et non des moindres : des avions feront office de navettes, le Qatar étant trop petit pour héberger tous les supporters. Certains seront donc logés dans des pays frontaliers. Autant d’éléments cumulés qui incitent bon nombre à d’individus à boycotter l’évènement, alors que la tendance est depuis plusieurs années à la prise de conscience écologique. D’ailleurs, en 2010, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) avait déjà publié quatre rapports alarmants, plus pessimistes les uns que les autres.

3.     Depuis quand est-ce une terre de foot ?

Pour nous Français, le seul lien régulièrement établi avec le Qatar est celui du Paris Saint-Germain, souvent surnommé amèrement “Qatar Saint-Germain”, tant les moyens mis à disposition semblent illimités. Or, à l’international, il n’a jamais brillé (uniquement des tours préliminaires) et sa première participation est venue tardivement. Son premier match officiel remonte à 1970. Toutefois, l’équipe a créé la surprise en 2019, remportant son premier sacre lors de la Coupe d’Asie des nations. Et si le Qatar était la 102e nation au classement Fifa en 2017, il est, à la suite de son récent sacre, montée 48e. De quoi assurer une légitimité ? Pas encore…

4.     Des droits humains ?

La tolérance au Qatar en matière de politique est extrêmement bancale. A l’image des droits des femmes ou de ceux de la communauté LGBT, la censure est omniprésente et les relations homosexuelles punies de plusieurs années de prison. Pourtant, sur le papier, les statuts de la Fifa interdisent systématiquement toute discrimination. En outre, au Qatar, 3 des 69 hôtels indiqués sur la liste officielle des établissements recommandés par la FIFA refuseraient l'entrée à des couples de même sexe. Par ailleurs, les citoyennes qataries doivent respecter des mesures de tutelle discutables qui imposent la présence ou l'accord d'un homme jusque dans leurs activités quotidiennes et installent une surveillance permanente. Les supportrices étrangères devront, quant à elle, se soumettre à quelques règles étranges, où leur tenue doit être couvrante et leurs contacts avec les hommes, limités.

 

Jamais une compétition internationale n’avait suscité un tel appel au boycott. Pourtant, nul besoin de remonter loin en arrière pour retrouver des traces d’évènements à l’organisation plus que douteuse : Coupes du monde en Argentine (1978) et en Russie (2018), Jeux Olympiques de Pékin (2022), etc. Alors, pourquoi tant d’acharnement autour de l’organisation du mondial au Qatar ? Un simple ras-le-bol de refaire les mêmes erreurs du passé ou d’autres éléments s’y greffent, entre croyances, cible facile ou encore déception de ne pas voir, une fois de plus, un pays de foot être organisateur. Car nombreuses auraient pu être les raisons de boycotter certaines autres compétitions pour des motifs de corruption, de bafouage des droits humains, etc.  Affaire à suivre !

Axel Poulain