Système assurantiel
Risque climatiques : une révolution pour le secteur agricole

Le fonds des calamités agricoles est remplacé depuis le 1er janvier par un nouveau dispositif de gestion des risques avec l’apparition d’un fonds de solidarité nationale. Le point sur cette réforme majeure, basée sur l’incitation, plutôt que l’obligation.

Risque climatiques : une révolution pour le secteur agricole

Depuis le 1er janvier 2023, le nouveau dispositif d’assurance récolte efface le régime des calamités agricoles pour faire place à un système public-privé à trois étages (voir encadré). L’objectif est de généraliser l’assurance Multirisque climatique (MRC), sans obligation mais par l’incitation. D’une part en amenant une baisse des coûts de l’assurance (grâce à un taux de subvention de 70 % sur la base d’une franchise à 20 % de perte) ; d’autre part en la rendant accessible à toutes les filières agricoles.

Le contrat assurera une perte de rendement sur la base d’une moyenne olympique ou d’une moyenne triennale. Ainsi, jusqu’à 20 % de pertes, l’agriculteur assumera financièrement sa part. Au-delà, pour les agriculteurs ayant souscrit un contrat, c’est l’assurance qui indemnisera. Et lorsque les pertes dépasseront 50 % en grandes cultures, cultures industrielles, légumes et viticulture et 30 % pour les autres productions notamment l’arboriculture et les prairies, la solidarité nationale sera activée via un fonds national (Fonds de solidarité nationale - FSN).

Faire des simulations

En cas de sinistre climatique exceptionnel (au-delà de 30 ou 50 % de pertes selon les filières. NDLR), ceux qui auront souscrit un contrat d’assurance multirisque climatique cumuleront l’indemnisation de leur assureur et celle de l’État. Au-delà des seuils de perte définis par l’État, les non-assurés, eux, percevront uniquement une indemnisation publique plafonnée à 45 % en 2023, 40 % en 2024 et 35 % en 2025 (au lieu de 90 % pour les assurés). À noter, cette solidarité nationale ne fonctionnera pas du tout comme l’actuel régime des calamités agricoles puisque seront seulement indemnisées les pertes au-delà des seuils de déclenchement du FSN fixés par l’État.

Chaque exploitation étant un cas particulier, aucune réponse globale ne peut être apportée sur les coûts du nouveau contrat d’assurance MRC. C’est pour cela qu’il est important que chaque agriculteur se rende chez les assureurs où peuvent être réalisées des simulations par nature de culture avant fin février car les assurances doivent être souscrites avant fin mars.

Flou sur le guichet unique

Le décret sur les conditions et modalités permettant aux exploitants agricoles de bénéficier d’une subvention à la MRC et de percevoir une indemnisation publique pour pertes catastrophiques est paru au Journal officiel le 30 décembre 2022. Il devait également apporter des précisions sur le guichet unique (réseau d’interlocuteurs agréés), dont la mise en oeuvre a été reportée. Sans surprise, la date butoir du 31 mars 2023 pour déclarer son interlocuteur agréé sur une « plateforme » développée par FranceAgriMer ne figure plus dans le texte, lequel garde le silence sur une nouvelle date. Un flou demeure aussi sur les conditions à remplir par un assureur pour qu’il soit considéré en « capacité technique » d’être un interlocuteur agréé pour un secteur de production donné (sauf pour la catégorie « Autres productions »). Ce flou sera éclairci par un arrêté du gouvernement. Une version précédente du décret, à l’état de projet, qu’Agra Presse avait pu consulter, proposait que l’assureur devait avoir commercialisé durant la précédente campagne « au moins cinquante contrats » subventionnés, « couvrant une surface totale d’au moins 200 ha » et « trois cultures différentes » dans ledit secteur de production.

Un nouveau cahier des charges finalisé

L’un des points clefs discutés par le ministère de l’Agriculture, les assureurs et les syndicats d’exploitants agricoles est la revalorisation des barèmes de prix. Appliqués aux rendements assurables, les barèmes de prix déterminent le montant de l’indemnité reçue par l’exploitant en cas de pertes de récolte. Interrogé fin septembre, Groupama souhaitait une « actualisation » des barèmes « pour recoller à la réalité des matières premières agricoles », en ce qui concerne le cours des céréales notamment. Deux sujets étaient portés par le syndicalisme majoritaire, qui estimait début décembre que le projet du ministère n’était « pas à la hauteur » : les critères de qualité (germination, taux de sucre insuffisant dû aux aléas climatiques…) et l’intégration des coûts de production. Interrogé le 9 janvier, le vice-président de la FNSEA Joël Limouzin annonce avoir « obtenu la réintégration de certains critères concernant la perte de qualité, pour revenir à la situation antérieure ». Plus largement, sur l’ensemble des barèmes de prix, « un engagement est pris par le ministère pour revoir le dispositif courant de l’année ». Pour l’heure, les coûts de production ne sont pas intégrés. La FNSEA demandait un système de « prix pivot », basé sur les prix de marché actuels intégrant les coûts de production.

Christophe Ledoux, L.M. et M.R. (Agrapresse)

Un mécanisme à trois étages

Le nouveau dispositif s’appuie sur un mécanisme d’intervention à trois étages avec un partage du risque entre l’agriculteur, les assureurs et l’État. Jusqu’à 20%, l’agriculteur assumera financièrement ses pertes. Au-delà, soit entre 20 et 30 ou 50 %, les pertes seront prises en charge par les assurances privées. Au-delà, lors de sinistres d’ampleur exceptionnelle, l’État interviendra via le Fonds de solidarité national (FSN). Pour bénéficier du FSN, les agriculteurs non-assurés devront impérativement être référencés auprès du guichet unique après sa mise en place. Durant la période transitoire, qui devrait s’achever au plus tard le 31 décembre, l’État gèrera le versement de l’indemnisation publique pour pertes catastrophiques aux agriculteurs n’ayant pas assuré leurs cultures.