Chambre d’agriculture
Se réinventer pour continuer à accompagner les agriculteurs

Dans un contexte économique délicat tant pour les exploitations agricoles que pour les chambres d’agriculture, ces dernières doivent se projeter sur leur avenir pour continuer à assurer divers services aux agriculteurs. Ainsi, lors de la session de la Chambre d’agriculture de la Loire, le 12 mars, les élus ont abordé des sujets relatifs à l’actualité agricole, au développement agricole, au fonctionnement de l’institution.
Se réinventer pour continuer à accompagner les agriculteurs

Jeudi 12 mars, les élus de la Chambre d'agriculture étaient réunis en session à Saint-Priest-en-Jarez. Bien évidemment, le sujet de l'épidémie de coronavirus Covid-19 a fait l'objet d'une intervention de Monsieur le Préfet de la Loire, Evence Richard, ainsi que de quelques responsables agricoles. Le préfet invitait à ne pas céder à la panique tout en faisant le maximum pour freiner la progression de la maladie (mesures-barrières). Depuis, l'épidémie s'est étendue et des mesures ont été prises. Il demandait également aux agriculteurs de s'interroger sur la manière dont leur exploitation pouvait continuer à fonctionner s'ils étaient atteints par la maladie. Philippe Dumas, président de Sicarev coop, conseillait quant à lui de faire circuler le message « d'avoir des attitudes rationnelles dans la consommation, car l'équilibre des marchés peut vite être déstabilisé. Il faut gérer en toute intelligence l'activité agroalimentaire. »
D'autres sujets d'actualité comme l'application de la loi EGA, la protection des cultures face aux dégâts de gibier, les Zones de non traitement et les chartes de riverains..., ont été abordés par des élus de la Chambre d'agriculture. Le préfet a pu leur répondre sur certains points. Les aides dans le cadre de la procédure des calamités pour les pertes de récoltes liées à la sécheresse 2019 pourraient être versées dans les prochains jours. Les arboriculteurs ont quant à eux jusqu'au 30 mars pour réaliser leur déclaration suite au gel. La période de déclaration pour les apiculteurs suivra.

 

Boues de stations

Des délibérations relatives au développement agricole ont été adoptées au cours de la session de la Chambre d'agriculture. L'une d'entre elles portait sur la Mese (Mission d'expertise et de suivi des épandages), que réalisait jusqu'au printemps dernier la Chambre d'agriculture de la Loire, et ce depuis 2007. Ce service étant réalisé à perte, les responsables de la Chambre d'agriculture ont pris la décision de suspendre l'activité, d'autant plus qu'ils ne pouvaient plus compter sur le soutien des collectivités. Après un gros travail de cartographie, d'analyses, de programmes prévisionnels d'épandages, de bilans agronomiques de plans d'épandage, de mise en place d'une base de données, la Chambre d'agriculture a dû se résoudre à arrêter ces actions. « Les services de l'État sont convaincus de l'utilité de la Mese et de la qualité de son travail, indiquait Monsieur le Préfet. C'est pour cela que j'ai relayé auprès des EPCI vos alertes, sans succès. » Evence Richard souhaite profiter du renouvellement des conseils municipaux pour remettre sur la table ce dossier.
Inévitablement, le sujet du projet de méthaniseur porté par la ville de Montbrison et Loire Forez agglomération est arrivé au cœur des débats. Ce dossier fait effectivement polémique dans le centre du département, notamment en raison du manque d'informations précises à l'attention des agriculteurs qui souhaitent s'engager à prendre du digestat pour l'épandre sur leurs terrains (engagements, risques pris...). « S'il y a un problème », de pollution des terres par exemple, « l'agriculteur sera seul pour gérer le problème », soulevait le président de la Chambre d'agriculture, Raymond Vial. Les membres de la Chambre d'agriculture s'interrogent sur l'origine et la composition des produits industriels qui seront introduits dans le méthaniseur et leur probable incompatibilité avec des cahiers des charges (fourme de Montbrison, blé CRC, Route du lait...) : « On ne peut pas demander, à travers la loi EGA, une montée en gamme des produits agricoles et en même temps laisser des agriculteurs signer des contrats pour épandre des déchets de méthanisation qui risquent de ne pas être conformes à des cahiers des charges. Les agriculteurs risquent de ne plus pouvoir produire la même chose, et donc de perdre de la valeur ajoutée. »
Ainsi, les élus de la Chambre d'agriculture ont adopté une délibération mettant « fin à l'expérience de mission d'expertise sur les épandages de boues de stations d'épuration » et « alertant les agriculteurs de la Loire sur les enjeux des engagements pris dans le cadre d'épandage de produits non normés ». Ils se disent cependant prêts à revenir sur cette position si les collectivités qui en ont la compétence montrent de l'intérêt à ce dossier.

 

L'eau, une priorité

Chantal Brosse, vice-présidente du Conseil départemental en charge de l'agriculture, confirmait que le Département de la Loire attachait toujours autant d'importance à l'agriculture. La preuve en est : le budget 2020 voté en février, qui est maintenu pour l'agriculture. La moitié est dédiée au fonctionnement et l'autre moitié à l'investissement : bâtiments, stockage et économie d'eau, sanitaire, entreprises agro-alimentaires et forestières, récupération et recyclage de pneus... « C'est important de pouvoir mener une politique conjointe entre la profession agricole et le Département, intervenait Raymond Vial. L'eau est un dossier prioritaire. Les exploitations agricoles doivent s'adapter au changement climatique et répondre aux attentes de la société. » Evence Richard confirmait que les retenues d'eau sont une priorité dans le département. « Le contexte est favorable. Le président de la République est favorable à ce type de projets. » Les agriculteurs doivent donc avancer rapidement dans leurs projets.

 

Les chambres d'agriculture se réorganisent

Alors que le budget initial 2019 de la Chambre d'agriculture de la Loire avait été adopté en novembre 2019 et que l'année 2019 est désormais terminée, les membres de la session de la Chambre d'agriculture ont eu à adopter la semaine dernière le compte financier 2019. Le solde est créditeur, à hauteur de 50 000 euros, malgré un contexte financier délicat pour les chambres d'agriculture. La capacité d'autofinancement est correcte et le niveau de fond de roulement se maintient. Les recettes de fonctionnement se répartissent ainsi : 50 % de prestations de service, 34 % de fiscalité, 16 % de conventions (entre la Chambre d'agriculture et des collectivités publiques pour des prestations de service). Quant aux dépenses de fonctionnement, leur ventilation est la suivante : 43 % de charges de personnel ; 33 % de services extérieurs ; 12 % d'achats ; 2 % de dotations aux amortissements ; 8 % de cotisations et subventions ; 1 % de frais financiers ; 1 % d'impôts et taxes.
Malgré le contexte compliqué pour les chambres d'agriculture, elles doivent avancer, se fixer des objectifs, se réinventer sur certains points... Suite aux élections de janvier 2019, les chambres d'agriculture ont élaboré un projet stratégique 2019-2025 commun pour l'agriculture, la forêt et les territoires. Il a été présenté lors de la session de la Chambre d'agriculture de la Loire la semaine dernière. Il se décline à l'échelle nationale, régionale et départementale, en trois axes majeurs : accompagner l'agriculture dans ses transitions économiques, sociétales et climatiques ; créer plus de valeur dans les territoires ; faire dialoguer agriculture et société. Ce projet stratégique doit nourrir le contrat d'objectifs conclu entre l'État et l'APCA et qui s'impose à toutes les chambres d'agriculture. Il définit les attentes et les engagements de l'État et des chambres d'agriculture à l'égard de l'activité du réseau, ainsi que des objectifs pour l'action des chambres d'agriculture.
Dans le même temps, les chambres d'agriculture mènent une réflexion sur l'organisation de leur réseau, intitulée projet Fair'RéseauT. « Elle vise à repenser nos engagements au service des exploitations agricoles et notre utilité pour les agriculteurs », précisait Pascal Monnet, directeur de la Chambre d'agriculture de la Loire. Il s'agit de projets d'organisation interne au sein des grandes régions de France, qui tiennent compte des tailles des régions et qui sont une alternative à la fusion des chambres d'agriculture départementales en une seule chambre régionale. « Les actions sont conduites en mode projet : volontarisme, choix, engagement, poursuivait Pascal Monnet. L'organisation peut être régionale ou interdépartementale selon les projets. L'objectif est de dérouler des actions au bon niveau, selon la motivation des acteurs, et de ne rien s'interdire. » Dans la Loire, des actions interdépartementales sont déjà en place.

 

Lucie Grolleau Frécon