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Cueillette

Champignons : ce qu'il faut savoir avant de partir en forêt

La tradition de la cueillette automnale des champignons séduit de nombreux amateurs. Mais ce loisir, aussi convivial soit-il, s’inscrit dans un cadre juridique précis. Pour éviter les mauvaises surprises et respecter la forêt, mieux vaut connaître les règles.

Par Alexandra Blanchard-Pacrot
Champignons : ce qu'il faut savoir avant de partir en forêt
Une cueillette sans autorisation dans un terrain privé peut être qualifiée de vol. ©AdobeStock

La cueillette des champignons constitue chaque automne un moment fort pour de nombreux habitants des campagnes. Promenade en famille, panier qui se remplit de girolles, cèpes ou bolets… mais derrière ce plaisir simple demeure un cadre légal important à respecter. Car contrairement à ce que pensent certains, cueillir des champignons n’est pas un droit absolu : la propriété du sol et la gestion de la forêt imposent des limites.

Le cadre juridique 

Tout d’abord, sachez que les champignons sauvages sont, juridiquement, des « fruits naturels » de la terre. L’article 547 du Code civil dispose que « les fruits naturels ou industriels de la terre appartiennent au propriétaire par droit d’accession ». Cela signifie que si vous pénétrez sur un terrain privé sans autorisation, la cueillette y est en principe interdite. En forêt publique (par exemple une forêt domaniale), l’autorisation n’est pas toujours formalisée : mais elle repose aussi sur le droit du propriétaire — l’État ou la collectivité — et les règles propres à chaque massif forestier. 


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Le Code forestier, notamment à travers son article R163-5, encadre ce prélèvement : « Le fait, sans l’autorisation du propriétaire du terrain, de prélever un volume inférieur à 10 litres de champignons, fruits et semences dans les bois et forêts relevant du régime forestier, sauf s’il existe une réglementation contraire, est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 4e classe. » En clair : il n’existe plus un « droit libre » à la cueillette. En l’absence d’arrêté local, une tolérance peut être appliquée, mais elle ne remplace pas une autorisation explicite. 

Quantités, période, arrêtés locaux

Souvent, pour les forêts domaniales ou publiques, il est admis que la cueillette, dans un cadre de consommation familiale, reste raisonnable. Par exemple, l’Office national des forêts (ONF) indique que « les prélèvements doivent rester raisonnables, c’est-à-dire qu’ils n’excèdent pas 5 litres par personne et par jour ». Mais cette règle n’est pas nationale ou automatique : beaucoup de départements ou communes fixent leurs propres seuils — 2 litres, 5 litres, 10 litres — par arrêté préfectoral. Par exemple dans certaines zones de Normandie, l’interdiction de cueillette est fixée certains jours de la semaine (ex. mardis et jeudis) pour limiter la pression sur les champignons. 

Sanctions en cas de non-respect

Le non-respect de ces règles peut entraîner des sanctions substantielles. Une cueillette sans autorisation dans un terrain privé peut être qualifiée de vol au sens de l’article 311-1 du Code pénal. Pour un prélèvement non autorisé mais inférieur à 10 litres, l’article R163-5 du Code forestier prévoit une contravention pouvant aller jusqu’à 135 euros. Pour un prélèvement supérieur à 10 litres, ou en cas de circonstances aggravantes (exploitation commerciale, dégradation, plusieurs cueilleurs), les sanctions prévoient jusqu’à 45 000 euros d’amende et trois ans d’emprisonnement. 

Autrement dit, même pour un particulier « qui va juste ramasser pour soi », dépasser ce seuil ou ne pas respecter un arrêté local peut vous exposer à des poursuites pénales.


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Si vous habitez en zone rurale ou fréquentez les forêts de la Loire ou des environs, voici ce que les recommandations à appliquer : avant chaque sortie, consultez la mairie ou la préfecture pour vérifier s’il existe un arrêté local de cueillette de champignons (quantité, période, jours interdits) ; si vous entrez sur un terrain privé (bois, sous-bois, parcelle forestière), demandez l’autorisation au propriétaire ; limitez votre récolte à un usage familial : les arrêtés locaux se réfèrent souvent à « consommation personnelle », non à la vente ; équipez-vous correctement (panier, sachez reconnaître les panneaux d’interdiction, soyez visible, informez un proche de votre lieu de cueille). En cas d’espèce rare ou milieu protégé, abstenez-vous ou faites vérifier avant de cueillir.

En définitive, la cueillette des champignons reste un moment de plaisir et de partage — à condition d’être bien informé. Connaître la réglementation, respecter la nature et cueillir raisonnablement permet de profiter pleinement de cette activité sans encombre.

Quelques cas particuliers et bons réflexes

Avant de partir en cueillette, mieux vaut connaître les règles qui encadrent la récolte des champignons : entre autorisations de propriété, protection des espèces et bonnes pratiques de prélèvement, la législation comme le bon sens imposent quelques précautions :

  • Forêts privées : dans ces terrains, l’autorisation du propriétaire est indispensable. La présomption d’autorisation (par ex. jusqu’à 5 litres) ne s’applique qu’en zone relevant du régime forestier ; en privé la règle est stricte : « souvent toléré mais autorisation requise ».
  • Espèces protégées ou zones sensibles : l’article L411-1 du Code de l’environnement permet d’interdire la cueillette de certaines espèces ou dans certaines zones si leur préservation le justifie.
  • Vente et commercialisation : la cueillette doit en règle générale rester dans le cadre d’une consommation propre. La revente des champignons sauvages cueillis sans autorisation ou sans respecter les quantités peut aggraver la sanction.
  • Mode de prélèvement responsable : privilégiez un panier en osier (pas de sac plastique), arrachez le champignon à sa base sans déraciner, respectez le milieu et ne piétinez pas. Ces gestes visent à préserver le mycélium et la régénération.