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Réunions d’information

Dermatose nodulaire contagieuse : vigilance accrue et mesures de protection

La semaine dernière, les représentants de Organisations professionnelles agricoles (OPA) de la Loire, et plus spécifiquement celles en lien avec l’élevage, étaient conviés à une réunion d’information sur la DNC. En complément, trois réunions destinées aux éleveurs étaient organisées cette semaine. Voici un point sur ce qu’il fallait en retenir.

Par Lucie Grolleau-Frécon
Dermatose nodulaire contagieuse : vigilance accrue et mesures de protection
De nombreuses structures départementales intervenant dans les élevages étaient représentées à la réunion d’information organisée à Feurs la semaine dernière sur la dermatose nodulaire contagieuse. ©LGF

Surveiller ses animaux et toujours les surveiller, tel était le message à retenir du directeur de la DDPP (Direction départementale de la protection des populations), Pierre Cabridenc, lors de la réunion d’information sur la Dermatose nodulaire contagieuse (DNC) la semaine dernière à Feurs dédiée aux responsables des d’organisations agricoles du département. Pour éviter que les éleveurs cèdent à la panique face à cette maladie virale contagieuse qui se développe en Savoie et Haute-Savoie, les présidents du GDS et de la Chambre d’agriculture avaient souhaité réunir leurs représentants pour faire un point sanitaire et se mettre d’accord sur la communication.

Effectivement, de nombreuses informations circulent dans les campagnes et sur le net, certaines sont vraies, beaucoup ne sont pas vérifiées ou fausses. « Chaque éleveur est invité à aborder le sujet de la DNC avec des professionnels afin de se faire confirmer toute information », insistait le directeur de la DDPP. Celles venant du GDS, de la Chambre d’agriculture et des services de l’Etat sont fiables. « Ce sont elles qu’il faut relayer », confirmaient le président du GDS (Groupement de défense sanitaire), Laurent Lachat, et celui de la Chambre d’agriculture, Rémi Jousserand. Le GDS de la Loire consacre une page de son site internet à cette maladie. Les informations y sont régulièrement mises à jour car la situation peut évoluer d’un jour à l’autre.

Transmission et symptômes

La dermatose nodulaire contagieuse, qui touche uniquement les bovins, est une maladie virale à transmission vectorielle par stomoxe (taons). Ceux-ci ont une activité intense la journée, en cas de forte chaleur. Il n’y a pas de dissémination à longue distance, à l’inverse des culicoïdes (vecteurs de la FCO et de la MHE) transportés par le vent. Les taons sont plutôt sédentaires et ont donc tendance à piquer les animaux d’un même troupeau.

La transmission de la DNC est mécanique, par portage du virus sur les pièces buccales du stomoxe. Le corps de l’hôte ne porte pas le virus et ne le multiplie pas. Le risque est de véhiculer les insectes porteurs par les transports d’animaux vivants ou par des voitures de particuliers (touristes, par exemple). Il faut rappeler que la maladie n’est pas transmissible à l’Homme, ni en direct, ni par les produits ou encore par piqûre d’insecte.


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Les principaux symptômes sont : apparition brutale de nodules sur la peau et les muqueuses (externes et internes), avec forte fièvre (41°C), abattement, écoulements naseaux et par les yeux, ganglions hypertrophiés. Jusqu’à 85 % du cheptel peut être atteint. La maladie a des impacts non négligeables sur les performances zootechniques et la reproduction : perte de production, amaigrissement, avortement. La maladie affaiblit beaucoup les animaux et les symptômes peuvent occasionner la mort (taux de mortalité entre 5 et 75 %).

L’incubation dure de quatre à quatorze jours, parfois jusqu’à un mois. Le virus se loge dans les lésions des animaux (nodule, squame, croûte, jetage, larme, salive). Il peut être isolé dans les lésions cutanées pendant 39 jours et détecté jusqu’à 92 jours. Le virus fait preuve d’une très grande résistance dans le milieu extérieur : au moins 80 jours à 20 °C, 8 à 10 jours à 37°C et 1 heure à 56°C (température d’inactivation).

Déclarer toute suspicion

La DNC est une maladie enzootique en Afrique sub-saharienne depuis les années 1900. Apparue en Europe de l’Est entre 2015 2017, elle avait été éradiquée par une vaccination régionale massive. Les foyers se multiplient en Afrique du Nord depuis 2023. L’Italie a enregistré ses premiers cas en Sardaigne le 21 juin 2025, puis en Lombardie (nord du pays) le 25 juin. Ces foyers sont en lien épidémiologique. Le premier déclaré en France date du 29 juin dans un élevage laitier de Savoie. Au 15 juillet, 21 foyers avaient été confirmés en Savoie et Haute-Savoie.

La DNC est inscrite sur la liste des maladies de catégorie A de la Loi de santé animale (LSA) européenne. Elle est soumise à déclaration et à éradication obligatoire et immédiate. Cela impose le dépeuplement des cheptels infectés par euthanasie sur place et très rapidement. L’objectif est de limiter les conséquences collectives, même si l’impact individuel est conséquent.

Le GDS et la DDPP insistent sur la nécessité de de surveiller quotidiennement l’état de santé des animaux, d’alerter immédiatement son vétérinaire sanitaire en cas de suspicion, qui la déclarera aux services de l’Etat et réalisera des prélèvements sur les animaux. L’élevage est alors mis sous surveillance par arrêté préfectoral et des mesures sont prises pour limiter les risques de propagation de la maladie : séquestration des animaux malades, interdiction de toute sortie ou entrée de bovins ainsi que toute sortie de produit ou déchet susceptible de véhiculer le virus, application de mesures de biosécurité.

La représentante du GTV (Groupement technique vétérinaire), Camille Porret-Blanc (clinique vétérinaire des Pierres jaunes à Saint-Denis-de-Cabanne), intervenait : « Je préfère avoir plusieurs suspicions à gérer plutôt que laisser passer un doute car la maladie se propage très rapidement. Faire une déclaration, c’est penser au collectif et à l’ensemble du cheptel français. »

Mesures de gestion

Si la maladie est confirmée, un arrêté préfectoral de déclaration d’infection est pris. Les mesures citées précédemment sont maintenues. Les animaux du foyer sont abattus sur place « pour éviter la propagation de la maladie à d’autres troupeaux et pour réduire la souffrance des animaux car les symptômes sont violents et conduisent souvent à la mort », argumentait Pierre Cabridenc. Les cadavres sont évacués par camions scellés. Les produits ou sous-produits (lisiers, fumiers) issus des bovins malades depuis 28 jours sont détruits ou traités. Le sperme et les ovocytes éventuellement produits dans ce même délai sont éliminés. L’établissement est nettoyé et désinfecté. « L’abattage total des bovins du foyer est la clé de voûte pour assainir un territoire » insistait Laurent Lachat.

Une zone de protection est établie 20 km autour d’un foyer et une zone de surveillance de 50 km. Le mouvement des bovins est interdit au sein de ce périmètre tout comme vers l’extérieur et les mesures de biosécurité et de surveillance sont renforcées. Les restrictions en zone de protection sont levées 28 jours après l’abattage des animaux du foyer et 45 jours en zone de surveillance. En dehors du périmètre réglementé, il n’existe pas de restriction de circulation des bovins au niveau national et à l’export.

La vaccination des animaux est possible. Elle a été utilisée pour éradiquer les épidémies précédentes en Europe. Cependant, elle engendre la perte du statut indemne pour le pays. Une demande a été faite auprès de l’Union européenne pour la mettre en place en France. Les doses devaient arriver cette fin de semaine pour protéger les animaux de la zone réglementée et ainsi former une ceinture de protection pour éviter la propagation de la maladie.

Préconisations sanitaires

Le GDS incite les éleveurs à soutenir l’immunité naturelle des animaux pour augmenter leur résistance, à restreindre l’accès de l’élevage et exiger la rigueur des intervenants et à gérer les insectes responsables de la transmission. Cela passe par la réduction des gîtes larvaires (tas de paille humide, croûte, litière, tas de fumier), le bâchage des tas de fumiers ou de compost, le traitement des lieux avec des larvicides et des animaux avec des insecticides ou des répulsifs.

La représentante du GTV invitait également les éleveurs à limiter les mouvements des animaux hors de la ferme, mais aussi en son sein. « Un foyer est assimilé à un lot dans un pré. Les éleveurs ont tout intérêt à ne pas mélanger leurs lots. »