Chambre d’agriculture
Ces réglementations excessives qui excèdent

La multiplication des réglementations, qui sont de plus en plus contraignantes pour l’agriculture et parfois contradictoires, était clairement au cœur des débats lors de la session de la Chambre d’agriculture de la Loire la semaine dernière.

Ces réglementations excessives qui excèdent
Catherine Séguin, préfète de la Loire, et Georges Ziegler, président du Département, assistaient à la session de la Chambre d’agriculture de la Loire, mardi 30 novembre.

« L’agriculture est face à des défis d’une extraordinaire complexité : elle doit nourrir la population, économiser l’eau, limiter la pollution… Elle est face à des enjeux parfois contradictoires qu’il faut concilier. Tout doit être mené de front et c’est ensemble que nous pouvons trouver des solutions. » La conclusion de la préfète, Catherine Séguin, résumait à elle seule la teneur des propos de la session de la Chambre d’agriculture de la Loire mardi 30 novembre à Feurs. Elle s’est montrée optimiste sur de nombreux dossiers, assurant que les revendications des représentants des agriculteurs avaient été entendues. Ces derniers étaient plus sceptiques quant à l’aboutissement de certains dossiers, pointant du doigt une accumulation croissante de contraintes et de réglementations pour les activités agricoles, conduisant à la démotivation des agriculteurs, mais aussi des responsables professionnels.

« Cette réunion est très symptomatique de l’état de ce pays, assurait Georges Ziegler, président du Département de la Loire. Il y a trop de distance entre le terrain et les centres de décision. Trop de réglementations tue la réglementation ! » « Des exigences sont imposées à l’agriculture, notamment sur le plan de l’environnement, mais elle ne doit pas être sacrifiée », intervenait Rémi Jousserand, membre du bureau de la Chambre d’agriculture. Il poursuivait en reprenant les propos de Christiane Lambert, présidente de la FNSEA : « Plus vert, c’est plus cher ! », faisant allusion à la mise en œuvre de la loi Egalim.

Réglementations sur les phyto

La session de la Chambre d’agriculture de la Loire était l’occasion de préciser aux élus la mise en œuvre pratique de la loi de séparation des activités de vente et de conseil des produits phytosanitaires en vigueur depuis le 1er janvier 2021 (1). Une nouvelle réglementation qui touche les agriculteurs, mais aussi la Chambre d’agriculture. Nicolas Charretier, membre du bureau de la Chambre d’agriculture, alertait les agriculteurs qui doivent renouveler leur Certiphyto prochainement : « Ils ne pourront pas le faire s’ils ne sont pas en mesure de fournir leur Conseil stratégique phytosanitaire (CSP). La Chambre est prestataire de l’Etat sur ce dossier. » Dans la Loire, à ce jour, elle est la seule structure habilitée à réaliser ce CSP. « Elle va donc devoir rencontrer tous les agriculteurs du département pour réaliser leur diagnostic, et ceci sans aides… »

Autre contrainte réglementaire en lien avec les produits phytosanitaires et qui a fait réagir : la publication du plan pollinisateurs, qui vise la protection des abeilles et autres insectes pollinisateurs lors de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques (plus d’informations dans le journal de la semaine dernière). Une motion a été adoptée par les élus de la Chambre d’agriculture demandant que les enjeux inhérents au monde agricole soient pris en compte.

Réglementations sur l’eau

Le sujet de l’eau a bien évidemment été abordé. « En France, la gestion de cette ressource n’est pas très claire, intervenait Nicolas Charretier. L’agriculture a besoin de l’eau pour l’abreuvement des animaux, pour les fourrages, pour le maraîchage… Beaucoup de réglementations s’empilent, les règles ne sont pas les mêmes entre les bassins Rhône-Méditerranée et Loire-Bretagne, des cartes servent au financement mais on ne sait pas trop comment elles ont été élaborées, imposant de nombreuses contraintes à l’agriculture. Dans le même temps, le Varenne de l’eau et les déclarations politiques vont dans le sens de ce que demande l’agriculture. »

Laurent Frécon, membre du bureau de la Chambre d’agriculture, revenait quant à lui sur la révision en cours de l’arrêté cadre sécheresse. « Il doit répondre à la fois aux réglementations européenne, nationale, de bassin. Au final, il y aura forcément plus de contraintes pour l’agriculture. A force de sur-réglementer, il n’y a plus de cohérence. Les agriculteurs vont capituler et il faudra importer des produits qui viennent d’ailleurs. »

Dans la discussion, il a été question de la problématique de certaines retenues qui ne peuvent pas bénéficier d’aides européennes car elles sont situées dans une zone de tension, problématique largement abordée lors de la visite de la préfète sur une exploitation la semaine précédente à l’initiative de la FDSEA et de JA Loire (lire ici). Gérard Gallot, secrétaire général de la Chambre d’agriculture et président de la FDSEA, a renouvelé sa demande d’organisation d’une réunion régionale à ce sujet.

« Ces sujets sont affreusement techniques, rebondissait Catherine Séguin. C’est le signe qu’il faut les simplifier. Nous avons tous besoin d’eau, mais elle est rare. On n’a jamais eu autant besoin de la préserver. » Elle annonçait la création d’un comité départemental de l’eau en janvier « pour s’inscrire dans une stratégie eau-air-sol, en réunissant les principaux acteurs de l’eau. L’objectif est d’avoir une gestion concertée qualitative et quantitative de l’eau. Ce comité a pour vocation à poser tous les sujets au sein d’une seule instance. C’est ensemble que nous devons identifier les difficultés et avancer. »

Réglementations sur l’air

Autre exemple de réglementation qui accable encore plus les agriculteurs : une Zone de faible émission (ZFE) se met en place sur Saint-Etienne Métropole (territoire interne aux axes de contournement de Saint-Etienne). Une ZFE vise à limiter la pollution émise par le trafic routier et, donc, à améliorer la qualité de l’air. Les producteurs livrant au marché de gros ou étant présents sur les marchés de la ville « n’ont pas les moyens d’acheter un camion électrique pour acheminer leurs produits. Certains ont d’ores et déjà pris la décision de ne plus livrer au marché de gros », rapportait Mickaël Mazenod. Des explications sur les ZFE seront apportées par la Chambre d’agriculture de la Loire dans le journal de la semaine prochaine.

Décisions imposées

Plusieurs élus de la Chambre d’agriculture qui suivent notamment les dossiers précédemment cités sont montés au créneau en interrogeant la préfète sur la nécessité de prendre part aux réunions « sachant que bien souvent les décisions sont prises plus haut et que, finalement, nous ne sommes là que pour les constater. En tant que représentants des agriculteurs, comment ensuite expliquer certaines réglementations sur le terrain ? » Mais la politique de la chaise vide n’est pas la philosophie de la Chambre d’agriculture, ni du syndicalisme majoritaire FDSEA-JA.

En guise d’illustration, Bertrand Palais expliquait qu’il a assisté à toutes les réunions pour travailler sur le PPA (Plan de protection de l’atmosphère) et qu’il a été indiqué, lors de la dernière, que tout serait remis en cause.

 

Lucie Grolleau Frécon