Aléas climatiques
Des vignerons dépités !

Les vignerons de la Loire ont été fortement touchés par les gelées, blanches et noires, entre le mardi 6 et le jeudi 8 avril. La récolte 2021 s’annonce d’ores et déjà très amputée.
 

Des vignerons dépités !
A Ambierle, Alain Baillon n’avait jamais connu un gel avec une telle intensité.

C’est un Stéphane Sérol un peu abattu qui décroche son téléphone. « Aujourd’hui, les vignerons ne préfèrent ne plus aller dans leurs vignes pour ne pas voir les dégâts », confie l’exploitant de Renaison. « C’est du jamais vu chez nous ! Lors des deux premières nuits de gel, on a eu la malchance d’avoir de l’humidité, un peu de pluie et un peu de neige, ce qui a accentué le phénomène ».
C’est lors de la nuit de mercredi à jeudi que les morsures du froid ont été plus sévères. « On est descendu jusqu’à -6°C », constate le président de Loire Volcanique. D’autres vignerons de l’appellation avancent même le chiffre de -8,4 ° C.
« On ne sait pas encore évaluer les dégâts. Je crois qu’on ne le saura vraiment qu’au moment de la récolte. Ce sera très hétérogène, d’un cep à l’autre. D’habitude, ce sont les bas de parcelles qui trinquent, là, ce sont les hauts ».
A Ambierle, Alain Baillon n’a qu’à sortir de chez lui pour constater le désastre. Il confirme l’analyse de son collègue, regard à l’appui : « Mes zones gélives normalement sont en bas. Pourtant, c’est le haut du coteau qui a gelé. Même des bourgeons peu avancés ont été touchés. Je n’avais jamais vu ça en quarante ans de carrière. » Mais ce n’est pas pour lui qu’il s’inquiète, c’est pour son successeur David Michelis (domaine Reniteo) qui va démarrer la sienne avec un millésime déficitaire.
 


Coteaux en souffrance


Un peu plus au sud, dans les côtes-du-Forez, la détresse est tout aussi palpable. « On est à l’agonie. Tout le monde nous appelle. Laissez-nous souffler ! On est en train de faire le tour pour évaluer les dégâts », lance Gilles Bonnefoy, président de l’association Vignobles Forez-Roannais.
Le président des Vignerons Foréziens, Loïc Chèze, a lui lancé une enquête auprès des coopérateurs pour évaluer les conséquences de l’épisode de gel. Il livre déjà des premiers éléments : « Contrairement à l’habitude, ce sont les coteaux qui ont été touchés - jusqu’à 60/70 % de bourgeons grillés - et les plaines plutôt épargnées. Les parcelles les mieux exposées, donc les plus avancées, ont le plus souffert. Le chardonnay qui débourre plus tôt est très concerné. Les gamays, qui étaient encore dans le coton, ont été plus protégés. C’est la chaleur de la semaine précédente qui a fait pousser la vigne et l’a rendue vulnérable au gel. »
 


Aucune appellation épargnée


Le sud du vignoble ligérien, normalement à l’abri, n’a pas échappé au phénomène climatique. « Des appellations comme condrieu, qui d’habitude ne sont pas concernées, ont été touchées, jusqu’à 100 % sur certaines parcelles », relate Patricia Putman, vigneronne à Malleval. Là encore, les coteaux qui affichaient de belles pousses ont trinqué tandis que les plateaux ont été plus préservés. « Nous avons été touchés deux nuits de suite et le gel commençait très tôt, dès 22 heures », raconte-t-elle.
Même les domaines qui ont utilisé des bougies pour lutter contre le froid n’ont pas réussi à se prémunir totalement « car on s’attendait à des températures de - 2 ou - 3 mais on est descendu bien plus bas ».
L’élue de la Chambre d’agriculture préfère ne pas avancer de volumes pour la récolte à venir. « On va attendre de voir ce que les contre-bourgeons vont donner. Mais on peut d’ores et déjà annoncer qu’il y aura des petits rendements. »
Et dire que la saison ne fait que commencer… Bien d’autres événements climatiques peuvent encore advenir, à commencer par des nouveaux risques de gelée dès cette semaine. (ndlr : annoncés pour mercredi 14 avril).
« Aujourd’hui, ce qui m’inquiète le plus, c’est qu’il n’y a plus un seul millésime sans fléau climatique, quand ce n’est pas le gel, c’est la grêle ou la canicule », conclut Stéphane Sérol, amer.
 
 

 
DB