Crise sanitaire et situation climatique délicate
Gestion des prairies, estimation des stocks et adaptation des rations

Nous sommes désormais mi-avril et aucune pluie significative n’a été relevée depuis un certain temps. Avec le retour des pluies significatives, il faudra plusieurs jours aux prairies pour initier une nouvelle pousse permettant de couvrir les besoins des troupeaux. En attendant, quelles peuvent être les stratégies à adopter, tout en tenant compte de la crise sanitaire ?
Gestion des prairies, estimation des stocks et adaptation des rations

Les mises à l'herbe des animaux se sont déroulées dans de bonnes conditions de portance pour la majorité du département. La pousse a été précoce et les animaux ont pu être lâchés de bonne heure, en moyenne 15 jours en avance. Par la suite, le retour des gelées de fin mars et le manque de précipitations n'ont pas permis de poursuivre le pâturage dans de bonnes conditions. En attendant le retour des pluies significatives (plus de 10 mm), il est nécessaire d'adapter les pratiques de pâturage. Ne pas sur pâturer est le premier élément à prendre en compte. Les animaux doivent sortir des parcelles avec une hauteur moyenne de 5 cm (hauteur du talon), afin que les fourragères puissent repartir rapidement avec les prochaines pluies. En l'absence de pousse significative, deux solutions sont envisageables : agrandir le tour de pâturage et/ou laisser les animaux sur des parcelles dites « parking » et affourrager.
Les fauches précoces vont pouvoir débuter sur la majorité des surfaces fourragères en zone de plaine dès l'atteinte des 700°C. Le bulletin info prairie hebdomadaire est désormais disponible sur les différents sites Internet et dans les pages Pratique de Paysans de la Loire. En raison des conditions climatiques actuelles, les premières coupes devraient se dérouler dans de bonnes conditions. Même si le rendement n'est pas forcément à l'optimum, le fourrage devrait être de qualité et il est nécessaire de le récolter pour ne pas perdre en valeur alimentaire. Une récolte précoce suivie d'une fertilisation organique (25 m3/ha de lisier) ou minérale (30 unités d'azote/ha) permettra d'envisager rapidement une nouvelle coupe. Certaines parcelles pâturées peuvent également être fertilisées dès les premières pluies.

 

Bilan fourrager

A cette période de l'année et vu les conditions météorologiques, il est important de faire le point sur les stocks de paille et de fourrages pour agir au plus vite :
- achat de paille ou de produits de substitution à la paille ;
- achat de foin ou autre fourrage ;
- vente des animaux improductifs du cheptel.
La première étape consiste à évaluer les besoins en fourrages pour l'exploitation. Tous les tableaux nécessaires à l'élaboration des besoins en fourrages à télécharger en cliquant ici.
Il faut définir les besoins en fourrages de votre exploitation. Ces tableaux, réalisés par la Chambre d'Agriculture de l'Indre, à partir des données de l'Institut de l'Elevage, permettent de réaliser un bilan fourrager. Ce document a été revu et complété par l'équipe élevage de la Chambre d'Agriculture de la Loire.
Un autre tableau permet de calculer les besoins en paille pour la litière. Effectivement, il ne faut pas oublier de prendre en compte les besoins en paille litière et de les comparer avec les stocks de paille sur l'exploitation. Dans la mesure du possible, il convient de laisser le maximum d'animaux dehors pour économiser en litière.
La seconde étape consiste en la réalisation de l'inventaire des fourrages : ceux conservés en vrac comme l'ensilage et ceux qui ont été pressés (enrubannage, foin, paille). Pour l'ensilage, il faut calculer le volume des silos en définissant une hauteur, une largeur et une longueur moyenne. En connaissant la teneur en matière sèche de l'ensilage, des tables de références sont en mesure de donner la densité en kgMS/m3. Pour les fourrages pressés, il faut faire l'inventaire des bottes d'enrubannage, de foin et de paille présentes. Le tableau ci-dessous donne des repères. Des tableaux dans le document à télécharger aideront à faire ces calculs.
Deux tableaux récapitulatifs des besoins et des stocks, à compléter, sont également disponibles sur ce document.

 

Adaptation des rations pour les bovins viande

Certaines catégories, telles que les génisses d'élevage de plus d'un an et les vaches prévues à la réforme, peuvent être temporairement sous-alimentées si l'herbe disponible est insuffisante. Ces animaux sont rassemblés sur une parcelle avec un râtelier de foin ou de paille avec mélasse. L'objectif est de les rationner de 25 % pour favoriser les autres catégories avec plus de besoins : vaches avec veaux, génisses d'un an.
Voici quelques indications pour rationner, si nécessaire, certaines catégories :
- génisses de deux ans vides ou en début de gestation : 4 kg de paille arrosée de mélasse (5%) + 1,2 kg céréales + 0,6 kg tourteau colza ou 6 kg de foin ;
- vaches sans veau : 7 kg de paille arrosée de mélasse (5%) + 2 kg céréales + 1 kg tourteau colza ou 9 à 10 kg de foin ;
Attention cependant à la teneur en urée de la mélasse : ne pas dépasser 30 g d'urée/100 kg de poids vif.
Les vaches avec veaux doivent être privilégiées avec un apport complémentaire de foin si nécessaire pour ne pas pénaliser ces deux catégories d'animaux. Si les veaux ont plus de cinq mois et pèsent plus de 200 kg, ils peuvent être sevrés s'ils consomment plus de 1,5 kg de concentré par jour. Les vaches auront alors des besoins inférieurs de 25%. Pour ces jeunes veaux, un aliment du commerce peut être remplacé par un mélange avec trois quarts de céréales et un quart de tourteau de colza, avec 2 % de minéral. Les veaux femelles peuvent être complémentées jusqu'à 2 kg/jour. Si les broutards sont plus lourds et nécessitent plus de 3 kg concentrés, il est possible de sécuriser la ration en incorporant de la pulpe de betteraves (50% céréales + 25% pulpe + 25% tourteau colza) ou en réalisant une ration fibrée.
Pour la finition des vaches à l'herbe, celles-ci valorisent bien la pousse printanière de l'herbe et nécessitent un faible apport de concentrés, souvent limité à 250 kg. Si l'herbe manque, un complément de foin ou d'enrubannage est nécessaire au râtelier. Un apport de concentrés limité à 4 ou 5 kg/jour permettra de finir les animaux de façon économique et de ne pas être pénalisé par un report éventuel des abattages. Un aliment du commerce peut être remplacé par un aliment du type 40% céréales + 30% tourteau colza + 30% pulpe. Rajouter 2 % de minéral si le manque d'herbe est important.

 

Stéphane Brisson et Pierre Vergiat, Chambre d'agriculture de la Loire