Syndicat montbéliard
Vers un retour des qualités bouchères ?

Ce jeudi 7 mars le syndicat montbéliard a tenu son assemblée générale. Si comme d’ordinaire le bilan de l’année a été dressé, une intervention de Montbéliarde Association quant à l’avenir de la race a cristallisé toute l’attention des éleveurs présents. 

Vers un retour des qualités bouchères ?
L’après-midi s’est poursuivi par une visite du Gaec des Clarines : environ 80 personnes y ont participé. © Photo fournie par le Syndicat montbéliard

La salle des fêtes d’Apinac est comble ce jeudi 7 mars, à l’occasion de l’assemblée générale du Syndicat montbéliard : une soixantaine de personnes, dont une majorité d’éleveurs actifs ont répondu présents. Hervé Lornage, le président, attaque la réunion : « C’est difficile de ne pas parler des mobilisations de ces dernières semaines, elles ont mis l’agriculture et ses problématiques au cœur de toutes les discussions. » La salle fait entendre son assentiment. 


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Pour ne pas laisser les adhérents s’engager dans cette voie, Hervé Lornage reprend la parole, se satisfaisant du bilan de l’année écoulée. « En 2023, l’élevage montbéliard s’est illustré à de nombreuses reprises, avec des préparations toujours très professionnelles pour les tournées de tri », liste le président du syndicat, saluant un « esprit collectif ». Les différentes vaches mises à l’honneur lors des concours de l’année, (Salon de l’agriculture, Génilait, Vaches en piste, Montbéliard Prestige Jeunes, le comice des 4 cantons, la Fête du lait, Sommet de l’élevage...) ont été saluées. 

Quatre vaches à plus de 100 000 kg de lait en 2023 

S’ensuit le classement ISU (l’index de synthèse unique). Dans la Loire, le Gaec des Champs, est à la première place (139, 14). Le top 10 ligérien du classement morphologique est aussi donné : c’est Virginie Meunier qui en prend la tête. 

L’assemblée générale du syndicat était aussi l’occasion de remettre les traditionnelles statuettes aux vaches ayant produit plus de 100 000 kg de lait en 2023 : Hervine, Gaec de l’Hôpital à Marcenod (100 726 kg de lait en huit lactations) ; Éclaire, Gaec Fulchiron à Marcenod (103 792 kg en onze lactations) ; Effigie, Gaec de Machezallet à Saint-Cyr-de-Valorges (108 120 kg en dix lactations) et Folie, Gaec des Gauds à Saint-Genest-Malifaux (117 783 kg en dix lactations). La grande gagnante de l’année n’est pas ligérienne mais haut-savoyarde : Carmen, Gaec La Ferme de Follon à Copponex, avec 141 525 kg en onze lactations. 


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Cette remise de prix a permis de mettre la production de lait ligérienne en parallèle avec celle de l’Hexagone. Ainsi, en 2022, la Loire comptait 4 189 lactations brutes chez les primipares, avec un âge de vêlage un peu plus jeune : 31 mois contre 33 au national, et une production légèrement plus importante : 7 162 kg contre 6 947. « Si on compare le cheptel avec 2012, il s’est érodé avec les années », commente Cédric Fourcade, directeur de Montbéliarde Association. Soit 850 animaux en moins pour la Loire. Cependant, la production de lait a légèrement augmenté sur cette même période. « Ainsi, nous avons moins de vaches, mais plus productives », poursuit l’expert. 

Moins de primipares, plus de vieilles vaches

Après la remise des statuettes à l’effigie des vaches récompensées, un long exposé, présenté par Montbéliarde Association, est proposé à l’assemblée. Il y est question des résultats du contrôle laitier, notamment pour les Montbéliardes, en 2023. L’intervenant est catégorique : « Nous avons perdu 320 000 vaches laitières en trois ans. » Soit 68 565 Holstein (-5,5 %) ; 6 733  Montbéliardes (-3,2 %) et 9 352 Normandes (- 5,7 %) en moins. Les secondes représentent 19,9 % du cheptel laitier contrôlé. « Dans les années 90, on comptait autant de Normandes que de Montbéliardes », détaille l’expert. La longévité et l’adaptabilité de la race expliquent probablement son succès d’aujourd’hui. Dans les données présentées, on note moins de primipares et plus de vieilles vaches : les Montbéliardes creusent l’écart dès la quatrième lactation avec les Normandes et les Holstein puisque 30,3 % d’entre elles sont à ce stade. Ainsi, leur âge de réforme est plus élevé : 76,5 mois contre 69,3 en moyenne. « On est la race qui a le plus pris en production de lait depuis dix ans. » 

La comparaison avec les Normandes se poursuit : la BDNI (Base de données nationales d’identification) pour la période 2003-2022 montre qu’elles ont perdu 51,4% de leurs effectifs.  Des chiffres qui ne font pas rire les éleveurs présents à Apinac qui s’inquiètent que leur race suive le même chemin (- 15,6 %, période identique). « Aujourd’hui, on compte 50 000 productions laitières en France, précise l’intervenant. On nous annonce 35 000 en 2040. » « Ça va être chaud », lâche un agriculteur. 


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Malgré la présence de nombreux jeunes installés dont la présence réjouit Hervé Lornage, la question de la transmission est sur toutes les lèvres. « Sur une échelle de dix ans, on perd 80 000 Montbéliardes quand la Simmental, la Brune et la Tarine se stabilisent. L’Abondance est protégée par ses AOP », souligne l’expert. « À quoi faut-il s’attendre pour garder la Montbéliarde ? » s’inquiète un agriculteur. Cédric Fourcade choisit ses mots avec soin : « Il faudra remettre du poids à la valeur bouchère. Pendant vingt ans, on a construit des églises et maintenant il faut des gymnases. » Si la formule prête à sourire, les agriculteurs la comprennent très bien : des bêtes moins grandes, plus larges. « Ce n’est pas un résultat que nous pourrons voir demain : pendant 20 ans, les qualités bouchères ont baissé. Il en faudra à nouveau 20, peut-être un peu moins, pour les retrouver et cela se fera au détriment de la morphologie, comme de la mamelle », avertit l’expert. 

Alexandra Pacrot 

Production / Les vaches à 100 000 kg

Montbéliarde Association remet chaque année depuis 1981 des statuettes aux vaches ayant dépassé les 100 000 kg de lait dans leur carrière, soit environ 1 392. 10,4 % des vaches produisent plus de 40 000 kg. Seules 0,4 % d’entre elles passent le cap des 100 000. Celles qui le franchissent produisent en moyenne 21,6 kg de lait par jour de vie. La championne reste Meri, née en 1996 : 178 233 kg pour quatorze lactations. Seules cinq vaches (sur les 1 392 récompensées) ont produit plus de 150 000 kg au cours de leur carrière.