Conjoncture
Machinisme agricole : une année 2023 encore incertaine

Le marché du machinisme en 2022 a été porté par les prix. Toutefois les délais de livraison qui se sont allongés au fil des mois du fait notamment d’une pénurie de matières premières, d’une hausse des charges et d’une instabilité diplomatique, inquiètent pour 2023. Le point avec les distributeurs et les constructeurs.

Machinisme agricole : une année 2023 encore incertaine
David Targy, responsable du pôle économique d’Axema.©Axema

Dans la filière machinisme, l’année 2022 peut être considérée comme une « bonne année ». En effet, selon la dernière note de conjoncture du syndicat national des entreprises de services et distribution du machinisme agricole, d’espaces verts et des métiers spécialisés (Sedima) en date du 7 décembre, l’augmentation du chiffre d’affaires pour la distribution de matériels agricoles est estimée entre 8 et 9 % par rapport à 2021. « Cette croissance tient à un bon niveau de la demande depuis le début de l’année, mais également aux hausses de prix que les distributeurs ont été contraints de répercuter pour préserver l’équilibre économique de leurs entreprises », indique le communiqué de presse du syndicat.

L’enquête du Sedima démontre également que sur les neuf premiers mois de l’année, les prix d’achat des matériels augmentent en moyenne d’au moins 10 % pour la majorité des distributeurs, et dépassent parfois 20 % pour certains matériels. « Il y a, toutefois, beaucoup de variations selon les régions, note Anne Fradier, secrétaire générale du Sedima. Là où la sécheresse a sévi, le marché est moins porteur que dans les régions céréalières par exemple. » À noter également que le chiffre d’affaires des pièces en magasin et les prestations de l’atelier ont également contribué au chiffre d’affaires en 2022 « même si près de 60 % des entreprises sont toujours contraintes de gérer l’allongement des délais d’approvisionnement des pièces ».

Du côté des constructeurs, David Targy, responsable du pôle économique d’Axema, le syndicat français des acteurs industriels de la filière des agroéquipements et de l’agroenvironnement, dresse également un bilan plutôt positif de l’année 2022. « Dans l’ensemble, l’année a été très correcte, portée par les prix. Les volumes de leur côté se maintiennent », explique-t-il. Sur l’ensemble des neuf premiers mois, le tableau de bord de l’agroéquipement d’Axema fait état d’une activité en hausse de 9,9 % en valeur et en retrait de 1,9 % en volume.

Un ralentissement en 2023 ?

En revanche, les constructeurs comme les distributeurs pointent du doigt les délais de livraison qui ont grevé le marché et impacteront certainement celui de 2023. « Les délais de livraison ont presque doublé. Pour certains matériels, la livraison se situe entre neuf mois et un an. En conséquence, des opportunités de vente sont perdues. Certains renoncent à l’achat ou se rabattent sur l’occasion dont les marchés sont aussi tendus », précise le responsable du pôle économique d’Axema. Au Sedima, le constat est sans appel : « à l’issue du troisième trimestre, près de 90 % des distributeurs sont toujours confrontés à des allongements de leurs délais d’approvisionnement ».

Toujours selon le syndicat de la distribution de machinisme agricole, « à mi-octobre, les délais d’approvisionnement annoncés aux distributeurs par leurs fournisseurs allaient de vingt-cinq à quarante semaines selon les matériels ». Une fin d’année incertaine qui laisse planer des doutes quant à l’évolution de la demande pour l’année prochaine. « Dans un contexte économique global incertain et inflationniste et malgré ou à cause du dynamisme de l’activité depuis le début de l’année, l’évolution de la demande était à mi-octobre, l’une des principales préoccupations des distributeurs. Certains craignent un ralentissement voire un retournement de l’activité en 2023 », alerte le Sedima.

Autre point de vigilance : l’acceptabilité des hausses des prix des matériels par les clients. « À l’issue du troisième trimestre 2022, le moral des agriculteurs était toujours considéré comme bon pour le marché des grandes cultures et, dans une moindre mesure, pour celui de la vitiviniculture », d’après le communiqué. La situation apparaît « moins favorable en polyculture élevage ». Quant aux perspectives d’activité des distributeurs, elles semblent « plutôt mitigées » pour le premier semestre 2023 : seule une minorité des sondés envisagent une augmentation de leurs prises de commandes en valeur de matériels neufs ou d’occasion, quand des « sources de croissance » sont plutôt attendues en atelier ou magasin. Du côté des constructeurs, selon David Targy, « les perspectives s’annoncent assez correctes. Nous sommes sur un marché résilient ».

Marie-Cécile Seigle-Buyat

Entrepreneurs des territoires : des hausses de tarifs inéluctables

« La flambée des coûts de production n’est pas encore terminée. La Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT) encourage les entreprises à réajuster leurs tarifs pour maintenir leurs investissements, fidéliser les salariés et éviter la rupture des chaînes d’approvisionnement. » Lors d’une conférence de presse le 7 décembre à Paris, Gérard Napias, le président, a annoncé la couleur. Les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers font face à une explosion des charges qu’elles seront contraintes de répercuter à leurs clients et aux agriculteurs en particulier. Pour ces entreprises, l’année 2022 a été « une annus horribilis. Les entreprises de travaux agricoles ont vu leur facture de carburant tripler », observe la FNEDT. Autre poste de charge qui a fortement évolué, celui des matériels dont le prix a littéralement pris l’ascenseur et pour lesquels de nouvelles hausses de 10 à 15 % sont annoncées l’an prochain, le tout couplé avec un allongement des délais de livraison. Le syndicat estime à 22 % l’augmentation des tarifs des prestations nécessaire pour que les entreprises conservent la même rentabilité.

D’après Actuagri